Au Canada, les services policiers garantissent la sécurité des citoyens et le maintien de l’ordre public. Pourtant, il arrive que des manquements surviennent dans l’exercice des fonctions. Pour s’assurer de l’intégrité des intervenants et encadrer leur champ d’action, un ensemble d’organismes de surveillance civile et d’unités d’enquête indépendantes a été mis en place aux niveaux fédéral, provincial et territorial. Quel est leur rôle ? Comment fonctionnent-ils ? Voici une présentation de ce dispositif.
Présentation de la surveillance policière au Canada

Au Canada, il n’existe pas un seul organisme national qui contrôle l’ensemble des services de police. La surveillance repose sur un réseau d’institutions complémentaires :
- Au niveau fédéral, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est assujettie à la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes de la GRC (CCETP‑GRC), un organisme indépendant chargé de recevoir et d’examiner les plaintes du public et de mener des examens systémiques.
- Dans les provinces et territoires, des organismes civils d’enquête indépendants se chargent des incidents graves impliquant des policiers (décès, blessures graves, allégations d’agression sexuelle ou d’infraction criminelle). À titre d’exemples, on retrouve le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) au Québec, la Special Investigations Unit (SIU) en Ontario, l’Independent Investigations Office (IIO) en Colombie‑Britannique, l’Alberta Serious Incident Response Team (ASIRT), l’Independent Investigation Unit (IIU) au Manitoba et le Serious Incident Response Team (SiRT) en Nouvelle‑Écosse, ainsi que leurs équivalents ailleurs au pays.
Parallèlement, chaque service de police dispose d’une unité interne de normes professionnelles et relève d’un conseil de police civil chargé de la gouvernance.
Les rôles ou missions des organismes de surveillance
Ces organismes assurent essentiellement le contrôle de la conduite et des pratiques des services policiers, tant sur le plan des incidents graves que de la gestion des plaintes du public. Ils veillent au respect des lois, des règlements et des codes de déontologie par les agents. Concrètement, leurs missions principales sont :
- la réalisation d’examens, d’audits et d’évaluations du fonctionnement des services de police à l’échelle canadienne, selon les mandats de chaque organisme ;
- la réception, l’évaluation et l’enquête sur les plaintes relatives à la conduite des policières et policiers (volet administratif/disciplinaires) et la conduite d’enquêtes indépendantes sur les incidents graves (volet criminel) ;
- l’amélioration continue des services policiers grâce à des études, des rapports publics et des recommandations.
Ces attributions permettent de corriger d’éventuelles dérives, de favoriser la transparence et de renforcer la confiance du public envers les services policiers.
Fonctionnement de la surveillance policière
La police des polices assure pleinement son rôle au Canada à travers trois axes complémentaires qui structurent le travail des organismes indépendants.
L’audition des services de police
Selon leur mandat, les organismes de surveillance peuvent effectuer des examens ciblés, des vérifications de conformité et des visites sur place pour apprécier la qualité des services rendus au public. Ces travaux portent notamment sur l’accueil, le traitement des personnes, la gestion des dossiers, l’usage de la force, la formation et les politiques internes. Ils peuvent aussi analyser la gestion des centres et recommander des correctifs.
Études et recommandations
Les organismes publient des études et des examens systémiques afin d’améliorer la qualité des services policiers. Au besoin, ils émettent des recommandations en matière de gestion, de gouvernance, de formation et de déontologie policière. Plusieurs rapports sont diffusés publiquement pour renforcer la transparence.
Les enquêtes administratives et judiciaires
Des autorités administratives et judiciaires, tout comme le public, peuvent déclencher des processus d’enquête distincts sur la conduite policière. On distingue généralement les enquêtes administratives (déontologie/discipline) et les enquêtes judiciaires (infractions criminelles).
Les enquêtes administratives
Un citoyen, une citoyenne ou une organisation peut déposer une plainte concernant la conduite d’un ou d’une policière. Pour la GRC, la CCETP‑GRC reçoit les plaintes, peut demander au service concerné de mener l’enquête initiale, puis en revoir le traitement et formuler des conclusions et recommandations. Pour les services policiers provinciaux et municipaux, des mécanismes semblables existent par l’entremise d’organismes civils de traitement des plaintes ou des unités de normes professionnelles. À l’issue des enquêtes administratives, des recommandations sont adressées au chef de police ou au commissaire compétent, qui décide des mesures disciplinaires à appliquer.
Les enquêtes judiciaires
Lorsqu’un incident grave survient (décès, blessure grave, allégation d’infraction criminelle), l’organisme d’enquête indépendant de la province ou du territoire ouvre une enquête. Les services de police ont l’obligation de notifier ces organismes. À la fin de l’enquête, l’organisme peut recommander ou déposer des accusations, puis transmettre le dossier au procureur de la Couronne, qui décidera d’intenter ou non des poursuites. Des rapports publics sont généralement publiés, sous réserve des lois applicables en matière de protection des renseignements personnels et de procédure judiciaire.
Qu’il s’agisse d’une enquête administrative ou judiciaire, les organismes de surveillance n’imposent pas directement les décisions finales en matière disciplinaire interne, et les tribunaux tranchent pour les affaires criminelles. Par ailleurs, les particuliers et les membres des services policiers peuvent désormais signaler des inconduites par des portails en ligne accessibles en français canadien et en anglais. Plusieurs organisations offrent aussi des lignes éthiques internes permettant de faire des signalements de façon confidentielle.